Sa cape était mordorée, sa dévotion toujours pure. Scythe Sand était tant de choses et pourtant si peu à la fois. Il était un mentor, un frère, parfois un apprenti. Il ne doutait jamais, sa résolution bastion pour tout scythe esseulé craignant de ne jamais arriver à atteindre raison. Il était silence quand tous le voulaient bruit. Il était cri quand ils le voulaient silence. Scythe Sand était dévot, pourtant dans ses passions il se faisait hérésiarque, la pureté de sa foi un tir dans la nuit. Il était obscur. Inconnu. L’énigme d’une vie. Parfois une idée plus qu’un homme, rares étaient ceux à connaître les méandres de son passé.
Fils de rien, vaurien ne devant de compte à personne, sa bicoque de travers portait sans mal ses habitants. Un père mort alors qu’il était adolescent, fruit d’un hasard salvateur pour une société ne pouvant s’en passer, il s’agit d’une blessure que le gamin ne put jamais pleinement vivre. Appelé par les Ordres avant de découvrir la vie, il était un apprenti hors pair, n’ayant d’autre but que d’honorer ceux morts entre leurs doigts. Assurant son rôle avec diligence, essuyant les doléances avec bon cœur, il fait partie de ces êtres riant des pleureuses avant de courber l’échine en leur assurant son respect. Versatile, homme aux multiples visages descendant d’un Janus oublié, on le dirait Dyonisos à la gloutonnerie mal assumée quand ce ne sont pas ses farces qui viennent à troubler l’ordre établi. Souvent raillé pour son originalité, toujours respecté pour sa droiture, il est de ces étranges qui malgré leur profession n’ont jamais perdu de cet éclat offert par la vie.
Fier représentant de l’Ancien Ordre, Sand n’a jamais eu d’yeux que pour les apprentissages lui ayant été inculqués par son propre maître, ce dernier les recevant du sien. Voyant d’un mauvais oeil les agissements de cet ordre nouveau, il dut observer l’avènement d’une soif de sang insatiable auprès de jeunes comme d’anciens scythe désireux de changer les choses. Crachant aux visages de ces hérésiarques à la foi plus changeante que l’opprobre les écrasant, il s’est fait de nombreux ennemis.
Contre toute attente, révoquant les axiomes ayant guidés sa vie, Scythe Sand commis l’irréparable il y a de cela quelques mois. Certains ont argumenté que le glanage fut prémédité, d’autres crient haut et fort qu’il s’agit d’un acte spontané. Personne ne sait véritablement ce qui força la main du scythe, ce dernier abattant sa faucille sur son frère sans ciller. Ayant commis péché impardonnable, refusant de ne pas assumer le poids de ses actes, il plaida coupable face aux instances les plus élevées de l’Ordre Scythe. Ne cherchant pas même à argumenter son acte, Sand n’avait que le silence à offrir à ses détracteurs quand on le destitua de son statut de faucheuse. Le dépouillant par la même occasion de son honneur, de sa raison d’être comme de son devoir.
Trop souvent déchiré entre alcool et rage, l’ancien scythe souffre de ne pouvoir porter le coup de grâce à ceux ayant corrompu tout ce en quoi il croyait. Ce en quoi il ne peut cesser de croire. Assumant une vie de vagabond, il se refuse à crever la bouche béante, offrant à voir aux passants les tréfonds de sa déchéance. C’est avec peine qu’il s’accroche à l’espoir, usant le peu d’énergie qui lui reste à souhaiter démanteler le Nouvel Ordre Scythe.

if you don’t have blood on your hands by the end of this you weren’t listening ( mentor ) ;; Scythe Sand n’a jamais été de ces hommes laissant leur foi au hasard. D’heures de recherches en observation minutieuses, il était de ces orfèvres prêts à travailler l’étoffe jusqu’à ce qu’elle n’épouse la forme de leurs doigts. Jetant son dévolu sur un enfant de bonne famille, c’était un coup du sort pour le fils de vaurien, leur engeance rien de plus que l’écho d’une vie qu’il leur fallait tout deux oublier. Sand vit en Ilyah ce qu’on avait vu en lui. Sans même frôler le vernis écaillé, il sentait sa faim labourer les bordures de son être, il voyait dans le gamin cette même rage qui autrefois l’avait consumé. Pourtant, son apprenti était si différent de l’enfant qu’il avait lui-même été à l’époque, pris par les doutes, rongé par cette peur qu’il éprouvait à tout instant pour sa famille, Ilyah était un élève dissipé, arrogant. L’échine toujours droite, les babines retroussées, il portait sa fierté avec la suffisance de ceux n’ayant jamais connu la mort, s’étant jusqu’alors refusés à la frôler. Le loup était sauvage, triste animal hurlant à la lune à ne plus savoir que dire maintenant qu’il avait été arraché à sa famille. Forgeron battant le fer lorsqu’il était encore chaud, le scythe n’avait de remords à s’user les phalanges sur l’inconscient, lui apprenant à vénérer le sceau de la faucheuse et sa destinée. Apprivoisant le loup du revers de sa main, il fit de la bête un membre de l’ordre, son apprentissage un enseignement sacré qu’il fallait vénérer en conséquence. Bien que le coeur semblait trop souvent prendre le dessus, son apprenti s’avéra à la hauteur de ses attentes, les grondements de la bête finissant par s’éteindre alors que s’élevait l’homme sur les ruines du gamin qu’il avait été. Scythe Newton est la plus grande fierté de Sand. Être façonné à son image, s’il n’offrit de progéniture à cette terre, il déversa son âme dans le cœur du brun jusqu’à ce que l’ichor de ce dernier se fasse divin. Devenu égaux, l’homme ne pouvait s’empêcher d’éprouver fierté à voir celui qu’il avait guidé accomplir son devoir avec la révérence et la grâce d’un scythe accomplissant son destin. Toujours de bon conseil, Sand n’abandonna jamais Newton à son sort, restant à ses côtés comme un père, mais aussi un frère et conseiller.

Ilyah n’a jamais véritablement compris ce que Scythe Sand avait vu en lui. D’après ce dernier, c’était la raison même pour laquelle il l’avait choisi. L’arrogance était factice, rien que de la poudre aux yeux, quand sous ses remparts se trouvait le myocarde d’un protecteur. Le cœur trop souvent au combat, assumant un rôle qui n’était pas sien, Ilyah s’était perdu de détours en cul-de-sac, perdant le sens de sa vie au gré de ses échecs. Sand avait bien senti cela, lui tendant la main à une époque où il ne pouvait refuser. Acceptant l’offre avec la diligence exigée, il accepta la couronne des dévots, les épines et le poids de ce choix lui brisant l’échine. Quand bien même cela l’obligea à s’éloigner de sa famille, son mentor lui assénant en permanence les réalités de leur condition, la solitude leur étant destinée. Sand brisa le loup, le défit de son pelage, de ses crocs, jusqu’à ce qu’il ne soit plus qu’un inconnu pour sa propre famille. Jusqu’à ce qu’il accepte enfin d’adopter la distance nécessaire avec les moitiés de son être. Avec les années, Ilyah apprit à vénérer Sand autant qu’il le haïssait. Chaque coup justifié et pourtant ses mots bien trop souvent plus douloureux que les blessures fleurissant sous son épiderme. Apôtre d’une foi en voie de disparition, le gamin fut baptisé à la chapelle de l’Ancien Ordre, celui-ci bien trop souvent méprisé. Suivant la voie de son mentor, les deux hommes sont compagnons dans la mort comme on ne peut l’être dans la vie.

La condamnation de Scythe Sand entacha la relation des deux hommes, Newton confus quant aux raisons de son maître. Plus confus encore par son désir d’avoir été celui portant le premier coup contre le Nouvel Ordre. Portant le premier coup contre ces hérésiarques conspuant les fondations sur lesquelles leur profession s’était élevée. Sand fut forcé au déshonneur, sa présence précédée du murmure de ses anciens compagnons quand il ose encore montrer son visage auprès des scythes l’ayant abandonné. Il fut dès lors considéré de mauvais goût que l’ancien apprenti continue à recevoir les conseils de son mentor, ce dernier un traître à leur ordre. Forcés dans ces temps obscurs, Newton de plus en plus désireux de s’élever contre le Nouvel Ordre, les hommes sont à un carrefour de leur existence. Sand capable de forcer un peu plus la main de son protégé, plaçant ce dernier au milieu de jeux politiques au futur sanglant ou alors l’épargner de ces maux à venir. Dans ces conditions, comment même croire qu’il y eut un choix à faire? Les deux incapables de fermer les yeux sur la dissolution de tout ce en quoi ils ont toujours crus.

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